dimanche 5 mai 2013

Jurassic Park 3D, la magie [Critique]


Il y a vingt ans, les dinosaures revenaient sur Terre. Du moins c'est ce qu'essayait de nous faire croire Steven Spielberg et son Jurassic Park, qui aura marqué à tout jamais l'histoire du cinéma et tous ceux qui ont eu la chance de le voir. Il y a vingt ans, c'était aussi l'année de ma naissance et quelques années plus tard, celle de la découverte du film qui a marqué toute mon enfance. Aujourd'hui il s'occtroit une ressortie dans les salles obscures, avec la mode de la réactualisation 3D pour ramener un peu plus de brouzoufs dans les caisses et faire découvrir ou redécouvrir le film qui aura fait rêver toute une génération. Si son statut de film culte n'est plus à démontrer, on peut se demander si la 3D apporte une réel plus à l'expérience, si l'émerveillement est toujours présent après les multiples visionnages, et surtout s'il n'accuse pas son âge.

Et il est impressionnant de constater que non, le parc jurassique n'a pas pris une ride et tient aisément la comparaison en terme d'effets spéciaux face aux blockbusters les plus récents, d'autant plus incroyable qu'il est le précurseur en la matière, le premier film à offrir une telle maestria visuelle. C'est simple, sans le savoir, il semble impossible de deviner qu'il ne s'agit pas d'un film de 2013 (hormis quelques détails aujourd'hui involontairement drôles, à l'instar de Lex qui s'exclame « Ouah, c'est un CD-Rom interactif ! ») tant le T-Rex et autres sauriens mettent à genoux n'importe quelle voiture anthropomorphique ou super-héros. Mais si la modernité du film tient sur l'avance fulgurante dont bénéficiait ILM en matière d'effets spéciaux en 1993, c'est l'intemporalité de la mise en scène de Steven Spielberg qui frappe, aussi bien dans le grand spectacle que dans l'intimité.

Le film mêle en effet habilement l'action et la terreur la plus profonde avec le développement des personnages et de l'intrigue. Basée librement sur le roman de feu Michael Crichton (un chef d'oeuvre lui aussi, différent et complémentaire au film), l'histoire nous amène au sein du parc en compagnie d'un groupe de visiteurs censés l'avaliser, avant que tout ne tourne au drame lorsque les animaux s'échappent. La première partie met en place l'intrigue et les personnages, ainsi le propos du film tournera premièrement autour des problèmes d'éthique que pose le clonage d'êtres vivants disparus, ainsi que la découverte de l'île et ses habitants. Chacun des personnages est caractérisé et possède sa propre personnalité, tout en faisant tous figures d'hommes et de femmes de tous les jours, de fait l'identification s'en retrouve facilitée, et les dialogues sont des pépites, regorgeant de répliques cultes (le fameux « j'en ai marre d'avoir toujours raison » de Ian Malcolm, et bien d'autres). L'accent est donc mis sur les interactions entre les personnages et leurs divergences de point de vue, et la façon dont ils vont réagir de manière profondément humaine, face aux situations extraordinaires auxquels ils seront confrontés et les vies qui seront en jeux, à ce titre le meilleur exemple reste celui du dialogue entre John Hammond, le créateur du parc, et Elie Satler, une paléobotaniste, après que les évènements aient commencé à mal tourner, ce premier exprimant avec émotion ses motivations à la création du parc. C'est typiquement ça, la force des figurants du cinéma de Spielberg : en faire des personnages humains, proches du spectateur, aux motivations et réactions touchantes. Quand au film, sa structure en deux temps allant crescendo montre tout le génie de son réalisateur, qui injecte au film tout son art de la mise en scène dans des scènes d'anthologie.

Mais bien sûr, la principale attraction du film, repose sur les dinosaures ! Confondants de réalisme, le travail abattu par les équipes d'ILM et du regretté Stan Winston reste toujours impressionnant et force le respect même vingt ans après, mais tout ceci ne servirait à rien sans encore une fois la mise en scène du cinéaste surdoué, qui crée selon ses envies l'émerveillement et la peur. Tout au long du film il naviguera dans tout un panel d'émotions, et chaque séquence est resté et restera durablement dans les mémoires par les sentiments qu'ils font naître chez le spectateur. Comment rester indifférent à la première apparition du majestueux Brachiosaure ? Ou ne pas sentir la pitié face au poignant Tricératops, ou l'émotion de la naissance du Vélociraptor ? Et même, ne pas se retrouver pétri l'effroi devant les Raptors et la fameuse scène de la cuisine ? Tous ces moments sont de véritables merveilles, le meilleur de ce que le cinéma a à offrir, et c'est cela que fait Steven Spielberg dans son Jurassic Park : donner une vraie leçon de cinéma en nous émerveillant et en parlant à l'enfant en chacun de nous. A cela, la magnifique bande-son de John Williams apporte toute sa puissance au film, et celle-ci demeurera comme l'une des plus belles de ses productions tant la symbiose entre l'image et le son sublime l'ensemble, à l'instar de l'arrivée sur l'île en hélicoptère. Pourtant, elle sait se rendre sourde pour l'un des passages les plus impressionnants et mémorables du cinéma : l'attaque du Tyrannosaure sur les jeeps. C'est ici que la vision sur grand écran prend tout son sens, on reste bouche bée devant le terrifiant dinosaure dont les cris résonnent dans toute la salle, et enfin la 3D (la meilleure que j'ai pu voir jusqu'ici) a une quelconque utilité, et la présence oppressante du Rex se ressent au cinéma comme jamais auparavant, donnant toute son utilité au déplacement en salle pour une expérience incomparable et inégalée. Et par la suite, c'est une heure de grand spectacle qui s'offre à nos yeux, Spielberg s'illustre comme un maître en rendant jubilatoire chaque cadrage, chaque mouvement de caméra qui mettent en valeur les personnages, les évènements et les dinosaures. Et encore une fois, vingt ans après et des dizaines de visionnages plus tard, la magie est toujours là, et on se surprend à vivre au rythme des émotions que nous donne le film comme la première fois. C'est ça, l'art de Steven Spielberg.

Jurassic Park passe la 3D et le XXIème siècle avec brio, redécouvrir ce chef d'oeuvre au cinéma était le plus beau des cadeaux pour le vingtième anniversaire. L'expérience du grand écran et de la 3D donnent toute la mesure de la grandeur du film. Spielberg a écrit l'histoire du cinéma avec ce qui restera à mes yeux, et ce pour l'éternité, le plus grand film de tous les temps.